La France s’exporte-t-elle au Liban… par la musique ?

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French Socialist Party’s MP and former Culture Minister, Jack Lang poses with a guitar on the stairs of the National Library of France aka François Mitterrand Library on June 19, 2011 in Paris. Source AFP

Le 16 avril dernier,  la visite du président de la République au Liban venait réveiller les mémoires et l’Histoire. Celle politique, économique, militaire et culturelle qui s’est écrite entre la Liban et la France depuis que son autonomie de 1961 fut garantie par la France : « Aujourd’hui, comme hier, la France se tient aux côtés du Liban, (…) notamment en raison des liens historiques et linguistiques », selon les mots de François Hollande, qui vante cette relation particulière qu’entretiennent les deux pays. Toutes ses considérations politiques font surgir une interrogation : quels liens entretiennent exactement la France et le Liban aujourd’hui ?

2 jours pour un soutien du Liban

La venue de François  Hollande ? Ce furent 2 jours pour parler aux responsables à la tête d’un système politique corrompu; 2 jours pour évoquer la crise institutionnelle et politique que traverse le Liban, qui sort à peine d’une crise des ordures,  encore non résolue. 2 jours pour soutenir la mise en place d’un président de la République, dont le poste est vacant depuis deux ans, en ces termes : «Nous n’avons qu’un candidat, c’est le Liban lui-même ». 2 jours ensuite, pour une aide de 50 millions cette année afin de faire face à une crise migratoire qui dure depuis 4 ans; deux jours pour annoncer l’intention de la France d’accueillir 3000 réfugiés syriens sur les 1 millions et demi qu’a accueilli ce pays de 4 millions d’habitants; pour finir, 2 jours pour annoncer le maintien des 900 militaires  français du la FINUL (Force Intérimaires des Nations unies au Liban), présents dans le pays depuis 1978, qui vise à garantir une souveraineté du Liban mise à mal au cours des 40 dernières années. Ainsi, le président de la République Française disait au chef du gouvernement libanais, Tammam Salam « Nous sommes avec vous ».

Une perception divergente

Pourtant, en dépit de l’affirmation du soutien de la France, la venue de François Hollande a suscité des avis contrastés dans le pays des Cèdres. L’éditorialiste du journal AL Nahar, l’un des quotidiens les plus importants du Liban s’est ainsi positionné : « Nous ne nous précipiterons pas pour juger cette visite à peine terminée, mais nous n’y décelons rien de positif, ayant dépassé le stade des formalités politiques, comme si les Libanais n’attendaient de la France que plus d’ingérence« . Talal Salmane, directeur de la rédaction du quotidien as-Safir, écrivait : « Tous ont pris la photo avec le président Hollande qui pourrait leur servir pour leur campagne électorale« . L’éditorialiste du journal al-Joumhouria à pour sa part qualifié la viste de Mr. Hollande d’ « indolore, si on la compare aux visites des présidents français dans l’histoire». Quant au titre de l’article publié directeur de rédaction du journal al-Akhbar, lié au Hezbollah,  il se fait la métaphore d’une critique plus vive encore: « L’hôte français qui pèse » avant de poursuivre et d’accuser Mr Hollande de « conseiller d’adopter un programme d’implantation des réfugiés syriens sans assumer la responsabilité de leur exil« . Aux yeux de l’opinion publique libanaise, la venue du président de la France ne semble pas avoir été perçue comme un signe fort d’entraide.

La fête de la musique : un évènement d’importance au Liban

Si l’on devait parler d’influence et de soutien, c’est avant tout sur le plan culturel que la France se manifeste aujourd’hui de la manière la plus visible et la plus indiscutable: l’institut français rayonne au sein de la haute-société libanaise de par les nombreux évènements qu’il organise : Cinéclubs, pièces de théâtre, salon littéraires jusqu’aux matchs de foot rassemblent l’élite et les personnalités les plus en vue de la capitale. Ce dynamisme francophone ne se cantonne pas à l’ambassade ni à l’institut français, tout deux  implantés rue de Damas, l’ancienne « ligne verte » qui démarquait le quartier chrétien et le quartier musulman lors de la guerre civile de 1975 à 1990.

L’influence culturelle française s’étend jusque dans les rues de la ville: ainsi la fête de la musique est-elle largement célébrée par les Beyrouthins. 80 000 personnes ont participé à l’occasion l’année dernière.  Le 21 juin prochain, la 16ème édition rassemblera les habitants de la capitale. Pour l’occasion, Jack Land, président de l’IMA (institut du Monde Arabe) et fondateur d’une fête célébrée dans plus de 700  villes du monde, se rendra à Beyrouth. Lors de la conférence de presse qui présentait l’édition 2016, le ministre du tourisme Rony Araiji déclarait, en présence d’Emmanuel Bonne, l’ambassadeur de France et du ministre de la culture M. Richard Pharaon,  que « La diversité des représentations proposées dans le cadre de cette fête démontre les liens forts et les ponts qui existent entre l’Orient et l’Occident. Et déjouent toutes les théories de choc des civilisations au profit de la rencontre et des échanges sous le signe de la musique. » Plus forte la musique ? Oui, plus forte que les tentatives de repliement et de l’exclusion de l’autre » .

Domitille Courtemanche

RAQQA : UN NOUVEAU BERLIN ?

 

Alors que les forces loyalistes avancent vers Raqqa de l’ouest, les Forces Démocratiques Syriennes (FDS) y avancent de l’est, en mettant l’État Islamique entre deux branches de tenaille, mais deux branches contradictoires…

 

 

     Cette semaine l’Armée Syrienne, soutenue par les iraniens, le Hezbollah, l’aviation et les forces spéciales russes, a déclenché une offensive vers le fief de Daech afin de le libérer. « Le camp oriental » a commencé l’attaque depuis l’axe d’Athriya au nord de Hama vers l’aéroport militaire de Tabqa, un aéroport de grande importance dans le but de contrôler la ville de Tabqa (à 50 km de Raqqa). Pour l’instant, ces forces ont réussi à s’enfoncer à plus de 40 km depuis l’axe citée. Tandis que les forces de (FDS), constituées d’une alliance arabo-kurde et soutenues par les États-Unis, ont déclenché leur attaque le 24 mai depuis la ville de Aïn Issa au nord. Ce sont les kurdes qui dominent la composition de ces forces. Selon les estimations américaines, ces forces comptent 25000 combattants kurdes et 5000 arabes. Les États-Unis ont déployé 300 soldats américains dans le but de diriger cette alliance. Actuellement, ces forces ont déclenché une attaque depuis le flanc occidental de l’Euphrate dans le but de contrôler la ville de Manbij, l’axe principal de ravitaillement de Daech depuis la Turquie. Ces mêmes forces ont déclaré le 08 juin qu’elles sont prêtes à entrer Manbij et d’avancer ensuite vers la ville de al-Bab, un autre bastion principal de Daech près des frontières syro-turques. Une fois ces deux villes sont contrôlées par ces forces, Daech sera isolé de son soutien logistique depuis la Turquie et la zone de domination kurde s’étendra tout au long des frontières syro-turques, sauf deux petites villes, Maré’ et Azaz contrôlées par des rebelles islamistes.

Carte de la domination militaire en Syrie. Source: wikimedia, disponible à l’adresse: https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=25226676

 

  • La course a commencé !

     Les analyses stratégiques affirment que les U.S. semblent pivoter vers l’Asie-Pacifique, mais il ne semble pas que les américains ont totalement abandonné leur intérêt au Moyen-Orient. Les deux grandes forces mondiales savent très bien que celui qui contrôle Raqqa contrôlera la Syrie et, par conséquent, la région du Moyen-Orient. Si les russes étaient les premiers, une ceinture chiite va être créée de l’Iran au Liban. Cette ceinture protégera la Russie des menaces djihadistes et empêche leur étendu dans le Caucase. Cela fait de l’Iran le grand homme du Moyen-Orient. Au niveau économique, les oléoducs et les gazoducs s’étendront de l’Iran en passant par l’Irak, la Syrie et le Liban vers l’Europe ; ce projet fait que l’Europe deviendra beaucoup moins dépendant du pétrole et du gaz des pays du Golfe, ce qui engendrera une baisse des prix du baril du pétrole au niveau mondial.

     Si les U.S. arrivent les premiers, ils vont installer un gouvernement opposant au régime de Damas, qui peut lancer des attaques diplomatiques et militaires depuis Raqqa. Cela garde l’eau du visage des U.S. devant les triomphes diplomatiques et militaires de la Russie, notamment que la Syrie a rendu à la Russie sa place comme force mondiale, et un joueur incontournable, pas seulement au Moyen-Orient mais aussi au niveau mondial. Au niveau économique, les oléoducs et les gazoducs qui s’étendent de l’Iran au Liban ne verrons jamais le jour, mais plutôt les pays du Golfe vont faire leurs propres gazoducs et oléoducs depuis le Qatar, en passant par l’Arabie (déjà en crise pétrolière difficile), la Jordanie, puis Raqqa (contrôlée par un gouvernement pro-américain( vers la Turquie et ensuite l’Europe. Dans ce cas-là, la ceinture chiite ne verra jamais le jour et la menace djihadiste va fatiguer la Russie, ainsi qu’on aura une Syrie divisée…

  • Et si les deux arrivent en même temps ?

   La question la plus intéressante est la suivante : que se passe-t-il si les deux forces mondiales principales arrivent en même temps au cœur de Raqqa ? Est-ce qu’on témoignera une Raqqa orientale et une Raqqa occidentale ? Cela engendrera quel impact sur l’avenir de la Syrie ?

    De toute façon, les forces kurdes ont déclaré qu’ils ne vont pas introduire Raqqa dans leur canton kurde autonome après sa libération, mais ils vont céder la place aux forces arabes « modérées ». Actuellement, les forces loyalistes soutenues par les russes et les forces de (FDS) soutenues par les U.S. avancent rapidement. C’est une question de temps ; celui qui arrive le premier impose sa domination sur cette région désignée comme « une marée » par l’administration d’Obama. La course a commencé, et tout scénario est possible.

  • Une vision géopolitique rapide sur le Moyen-Orient :

   Quant aux turques, leurs relations avec les russes sont très stressées, et les U.S. semblent les abandonner après l’échec de leur projet néo-ottoman d’être « le Vatican du sunnisme ». L’appui américain aux forces de (FDS) en préférant de faire une bande kurde tout au long des frontières syro-turques donne l’idée que les américains ont des mal entendements avec leur allié turque membre de l’OTAN. La Jordanie et le Liban ne sont pas en situation favorable actuellement ; leur basculement dans le chaos islamiste est fort probable. La sécurité d’Israël est garantie par les russes comme par les américains, notamment après la dernière visite de Benyamin Netanyahou à Moscou le lundi dernier. Cette visite semble assez fructueuse. Les russes ont soulagé les israéliens et ont garantie que la Syrie ne déclenchera pas une guerre contre Israël dans l’avenir. Ici, il s’avère que les russes ont une vision d’une paix régionale au long terme. L’avenir de l’Irak, du Liban et de l’Égypte dépend aussi du vainqueur.

   Tout au long des dernières années, les occidentaux ont préféré de s’allier avec les pétromonarchies sunnites dans la région, malgré que ces dernières sont les parrains du terrorisme mondial et du courant wahhabite (une idéologie très fanatique de l’Islam adoptée par les terroristes dans leur projet d’un État fondé sur la charia). Mais aujourd’hui, ces pétromonarchies sont en crise pétrolière profonde qui ne donne pas assez d’optimisme aux relations avec l’Occident (peut-être cela sera la fin du soutien du terrorisme mondial). La chaleur revient peu à peu aux relations avec l’Iran chiite, ce qui s’explique par l’accord du nucléaire iranien, ce qui renforce l’idée que l’Iran sera le grand homme du Moyen-Orient et que la ceinture chiite aura lieu un jour.

  Donc, de ce qui précède, le contrôle de Raqqa constitue une partie d’une vision géopolitique générale de la région, une vision qui joue sur les différents niveaux économiques, politiques et diplomatique ; ainsi que sur l’hégémonie mondiale et la paix régionale accompagnée de l’éradication de la menace djihadiste. Cela fait de la Syrie aujourd’hui le centre de préoccupation du monde, parce que le vainqueur dans ce pays imposera un nouvel ordre mondial.

 

2/2 Hezbollah : la mort de Badreddine, fort symbole politique au Liban

Rappel : Moustapha Badreddine, l’un des principaux chefs militaires du Hezbollah, a été tué en Syrie dans la nuit du 12 au 13 mai 2016, près de Damas. Personne n’a revendiqué cette attaque. Pourtant, Si les circonstances de sa mort n’ont toujours pas été élucidées, ce deuil au sein du parti chiite libanais revêt un fort symbole politique, qui renforce les tensions dans le pays.

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Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Photo d’archives / AFP

Menaces contre Israël, la Turquie et l’Arabie Saoudite

A travers cet hommage, le Hezbollah a réaffirmé qu’il ne compte nullement se retirer du conflit syrien : entre 7 000 et 10 000 de ses hommes se trouveraient sur place.  Sa présence en Syrie au côté des troupes de Bachar Al Assad représente un enjeu majeur pour le parti de Dieu: son objectif vise à combattre les forces extrémistes qui selon lui,  agissent à la botte des États-Unis et d’Israël. Bien que le Hezbollah accuse les rebelles syriens d’être à l’origine de la mort de Baddredine, plutôt que l’État Israélien, le chef du parti n’a pas manqué d’agiter une menace de représailles à son encontre, « quelles qu’en soit les conséquences (…) s’il s’attaquait à des membres du Hezbollah ». D’autre part, Hassan Nasrallah à mise en garde la Turquie et l’Arabie saoudite contre une « guerre mondiale » en cas d’intervention sur le sol syrien.

Un contexte d’élections municipales au Liban

L’intervention orale d’Hassan Nasrallah s’ancre dans un contexte politique électoral particulier pour le Liban. Lors des funérailles, le chef du Parti de Dieu à appeler à participer au troisième round des élections municipales le dimanche, qu’il juge « très importante, notamment dans le cadre de la guerre psychologique menée contre nous ».  Achevées le 29 mai, les résultats ont donné la victoire au Hezbollah dans la plupart des localités du sud du pays. Plus généralement, la tenue de ses élections pourrait être un signe encourageant vers des élections présidentielles alors que les deux listes qui siègent à l’assemblée ne parviennent pas à se mettre d’accord malgré 39 tentatives qui n’ont pu aboutir. La liste du 8 Mars, liée au Hezbollah, pro-Assad et soutenue par l’Iran, s’oppose à celle du 16 mars, hostile au régime syrien, plus proche de l’Arabie Saoudite et de l’Occident.

Le renforcement des tensions entre les chiites et les sunnites libanais

Trois ans de présence du Hezbollah en Syrie ont provoqués de fortes divisions au sein des différents partis du Liban. Dans ce contexte, les tensions politiques ainsi que celles entre les sunnites et les chiites libanais se sont renforcées. En 2013, des attentats ont été commis dans la banlieue sud de Beyrouth, quartier à majorité chiite, revendiqué par des groupes djihadistes sunnites qui visait à « punir » le Hezbollah pour son soutien à l’armée syrienne. D’autres part, des accrochages réguliers ont lieu à Tripoli, entre sunnites et alaouites, une branche du chiisme dont est issu la famille Assad. Pour certain, l’action militaire entreprise par parti chiite met en péril la sécurité d’un pays qui souffre d’être l’otage de la situation instable des pays frontaliers.

Légitimation du Hezbollah

Pourtant le Hezbollah s’est légitimé auprès de beaucoup d’autres par le succès des interventions militaires en Syrie : en mai 2013, la présence de ses troupes dans la bataille LQusayr, près de Homs, avait permis à Bachar Al Assad de reprendre contrôle de la région et de stabiliser le régime. Aux yeux de ses nouveaux partisants, il se présente comme rempart face à l’Etat Islamique et de le Front Al Notsra,  dont les agissements à quelques kilomètres des frontières du pays, sont source d’inquiétude pour la population. D’autre part, le Hezbollah pallie au manquement de l’armée libanaise sur des questions défensives, dans le Sud du pays. Ainsi en juillet 2015, 79,9 % des chiites libanais ont estimés que les actions du Hezbollah en Syrie «leur permettaient de se sentir davantage en sécurité». Par ce biais, le parti a renforcé son influence au sein de certaines communautés chrétiennes, désormais allié au Courant Patriotique Libre, créant de nouvelles divisions face à la coalition anti-syrienne de la liste du 14 mars.

Vers une déstabilisation du Liban ?

Le renforcement de l’action d’un Hezbollah dans cette guerre voisine, fait surgir les fantômes du passé : la crainte d’une déstabilisation du pays et du réveil d’une guerre civile, dont celle qui frappa le pays de 1975 à 1990, continue d’ habiter les esprits. Plus encore, l’emprise du Hezbollah  sur le pays témoigne de la difficulté de l’Etat Libanais à s’affirmer en tant que tel, et expose au grand jour ses fragilités.

 Domitille Courtemanche

1/2 Hezbollah : la mort de Badreddine, un fort symbole politique au Liban

1 / 2 Hezbollah : la mort de Badreddine, fort symbole politique au Liban

Moustapha Badreddine, l’un des principaux chefs militaires du Hezbollah, a été tué en Syrie dans la nuit du 12 au 13 mai 2016, près de Damas. Personne n’a revendiqué cette attaque. Pourtant, Si les circonstances de sa mort n’ont toujours pas été élucidées, ce deuil au sein du parti chiite libanais revêt un fort symbole politique, qui renforce les tensions dans le pays.

Brothers of top Hezbollah commander Mustafa Badreddine, who was killed in an attack in Syria, mourn over his coffin during his funeral in Beirut's southern suburbs

Brothers of top Hezbollah commander Mustafa Badreddine, who was killed in an attack in Syria, mourn over his coffin during his funeral in Beirut’s southern suburbs, Lebanon, May 13, 2016. REUTERS – D.R

L’hommage rendu au martyr

L’annonce du décès est tombée dans un communiqué du parti, vendredi 13 mai. L’homme aurait été tué dans une explosion d’un entrepôt, à proximité de l’aéroport de Damas, situé au Sud de la capitale syrienne. Une semaine après, les militants du Hezbollah ont rendu un dernier hommage à Moustapha Badr Eddine, commandant militaire suprême de ce parti libanais de confession chiite. Des tirs nourris résonnent dans la capitale, autour du cercueil recouvert d’un drapeau jaune, en l’honneur de cette figure emblématique, qui contribua à fonder le parti dans les années 80. Pourtant, en dépit du recueillement de ses membres,  la réaction du chef du parti ne s’est pas fait attendre. Le 20 mai, jour des funérailles, l’hommage rendu à ce « commandant martyr » se faisait le porte-étendard de la présence du Hezbollah dans le conflit syrien.

Renforcement du Hezbollah en Syrie

Agé de 55 ans, Moustapha Badredinne avait proclamé qu’il ne sortirait de Syrie que  « victorieux ou en martyr ».  Dans la continuité de ses paroles, le leader du parti chiite libanais, Hassan Nasrallah, a déclaré dans un discours  prononcé au cours de la cérémonie: « Le sang de Badreddine va nous pousser à renforcer et accroître notre présence en Syrie ». L’offensive au côté du gouvernement syrien est arrivée sans tarder : des attaques ont été menées dans la capitale de la Ghouta Orientale, fief rebelle du front Al-Nostra,  situé à l’Est de Damas. D’une certaine façon, les « dernières volontés » de Badreddine,  en charge de coordonner les unités militaires en Syrie et stratège de cette bataille, ont été respectées.

Au sein du Hezbollah, la perte d’une figure importante

1500 de ses combattants ont déjà péri en Syrie depuis leurs premières interventions au printemps 2013, dont 5 de ses principaux chefs militaires. Son Beau-frère d’Imad Mughniyeh, un ancien commandant du Hezbollah avait été assassiné en Syrie en 2008. A Ces morts s’ajoutent le nombre des blessés, qui serait 5000. Moustapha Badr Eddine est le chef le plus important disparu jusqu’à ce jour. Pour Hassan Nashrallah, il représente « l’un des premiers hommes de la résistance islamique à faire face à l’ennemi israélien ». D’abord membre du Fatah, le mouvement de libération de la Palestine, l’invasion israélienne de l’été 1982 au Liban le conduisit à prendre les armes à côté du Hezbollah. Fait prisonnier à la suite d’attentats perpétrés contre les ambassades américaines et françaises  au Koweït en décembre 1983, il était parvenu à se libérer lors de de l’invasion irakienne dans ce pays, en 1990, par les troupes de Saddam Hussein.

Baddredine, une personnalité contestée au Liban

S’il est célébré par le Parti de Dieu, cette position n’est pas celle adoptée par le Tribunal Spécial pour le Liban (TSP), chargé de poursuivre les auteurs d’attentats terroristes. Suspecté d’être le « cerveau » de l’attentat de 2005 qui coûta la vie à Rafic Hariri, l’institution avait émis un mandat d’arrêt international à son encontre. Il était en effet accusé d’être l’un des cinq principaux parti-prenant dans la planification de l’assassinat de l’ex-premier ministre libanais sunnite. Des affirmations que le Hezbollah s’est toujours efforcé de démentir : « le dossier du tribunal international n’existe pas pour nous et ne mérite aucun commentaire de notre part ». Cet attentat avait déclenché la Révolution des Cèdres; appuyée par une majorité de chrétiens et des sunnites, qui conduisit au départ des troupes syriennes du pays, en 2006.

2/2 Hezbollah : la mort de Badreddine, fort symbole politique au Liban

Domitille Courtemanche

Crise présidentielle au Liban: vers une solution?

Au Liban, le poste de président de la République doit constitutionnellement être attribué, par le Parlement, à un chrétien maronite. Or, depuis le 25 mai 2014 et le départ de Michel Sleiman (soit 388 jours), le poste est vacant. Et ce dans l’indifférence presque complète des sphères médiatiques occidentales. Cette vacance du pouvoir s’explique notamment par l’absence d’accord entre les différentes parties, malgré vingt-quatre sessions parlementaires (la dernière au 3 juin 2015). Ces sessions en question ont principalement et majoritairement échouées par l’absence de quorum[1]. En effet, les députés du Courant patriotique libre (CPL) et du Hezbollah bloquent régulièrement le processus d’élection en ne se présentant pas aux sessions.

La crise syrienne comme blocage principal.

Depuis 2011, la Syrie est en pleine guerre civile. Ce pays voisin du Liban a toujours eu une influence majeure dans la vie interne libanaise. La crise présidentielle actuelle, que traverse le pays du Cèdre, est aussi fortement (voire complètement) influencée par les évènements en Syrie. En effet, les différents partis se séparent entre les pros et anti Bachar El Assad. Et aucun ne souhaite voir s’installer un président qui lui serait défavorable. L’absence d’un candidat du compromis ne permettrait pas une évolution rapide. Le CPL et le Hezbollah ont pour le moment opté pour la politique de la chaise vide lors des séances prévoyant l’élection d’un président, mais rien n’indique qu’ils seront les seuls à y avoir recours. L’absence de dénouement en Syrie pourrait donc bloquer la crise présidentielle libanaise pour une durée indéterminée.

La rencontre entre le général Aoun et Samir Geagea.

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Cependant, un récent évènement laisse supposer une possible sortie de crise : la rencontre entre deux leaders chrétiens maronites. Il s’agit du général Michel Aoun, chef du CPL, et de Samir Geagea, chef de la milice des Forces libanaises (FL). Les deux hommes ne s’étaient plus vu ni parlé depuis une décennie, et ils convoitent tous les deux le poste de président de la République Libanaise. A l’issue de leur rencontre, le 2 juin dernier, les deux hommes ont fait une déclaration d’intention (en 16 points), fournissant les bases du dialogue entre les deux formations. Une bonne nouvelle donc qui pourrait relancer le dialogue inter-chrétien au Liban. Seulement, les deux protagonistes sont unanimes : cette rencontre est le signe du début du dialogue, non celui de la fin. Il reste en effet de nombreux différents pour mettre fin aux divisions entre chrétiens. La rencontre Aoun-Geagea laisse ainsi la place à l’espoir d’une sortie de crise, mais dans un délai relativement long.

Le Liban : une lutte d’influence.

« […] ce n’est pas qu’une affaire interne » déclare la communauté maronite quand elle évoque le vide présidentiel prolongé[2]. En effet, l’Iran et l’Arabie Saoudite ont fait du Liban un objet de lutte d’influence. L’Iran chiite soutient le Hezbollah tandis que le royaume saoudien sunnite est proche du Mouvement du 14 Mars, qui regroupe les antis Bachar El Assad. Les deux puissances régionales cherchent à intégrer le Liban dans leur zone d’influence afin d’imposer leur vision au Moyen-Orient. Un affrontement diplomatique fort qui empêche aussi une sortie de crise au Liban. L’Iran ne compte pas perdre pied dans un pays où la République Islamique d’Iran a cherché à s’installer depuis la Révolution en 1979. L’Arabie Saoudite quand a elle veut empêcher l’Iran de s’imposer au Liban. Pour certains, ceci s’explique par la peur d’un « arc chiite » allant du Pakistan à la mer méditerranée et qui pourrait affaiblir le pouvoir sunnite dans la région. Ce jeu géopolitique ne laisse donc aucun espoir d’une solution rapide à la crise présidentielle libanaise.

Après 388 jours sans président, il semble que le Liban peut trouver une solution. Mais pas avant plusieurs mois. Les puissances régionales, la crise syrienne, ainsi que les différents internes empêchent le retour d’un chrétien maronite sur une place qui lui est constitutionnellement garantie.

François VOUTIER

[1] Au minimum, les deux tiers des députés libanais, soit 86 sur 128, doivent être présent pour qu’un vote puisse se tenir.

[2] Marie Malzac, « La diplomatie vaticane au Liban », dans Famille Chrétienne, n°1952 (du 13 au 19 juin 2015), Paris, Edifa, p.24.

Commémoration de l’attentat du Drakkar au Liban

(c) DR

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Il y a 31 ans, la France était en deuil. Le 23 octobre 1983, 55 parachutistes du 1er régiment de chasseurs parachutistes (1er RCP) et 3 parachutistes du 9e régiment de chasseurs parachutistes (9e RCP) trouvaient la mort au Liban, lors de l’attentat sur l’immeuble du Drakkar.

Le dimanche 23 octobre 1983, un jour qui reste gravé dans la mémoire de nos soldats

En pleine guerre du Liban, deux attentats quasi-simultanés frappent les contingents américain et français de la Force multinationale de sécurité à Beyrouth. Ces attentats furent revendiqués par le Hezbollah et le Mouvement de la révolution islamique. Les nations occidentales assistent sans comprendre à la naissance du jihad islamique, nouveau mode de terrorisme. Certains pensent à la Syrie et à l’Iran, d’autres évoquent l’influence soviétique. Le double-attentat du 23 octobre 1983 est pourtant aussitôt revendiqué en des termes clairs par des nébuleuses, l’Organisation du jihad islamiste et le Mouvement de la révolution islamique libre. On ne parle pas encore du Hezbollah (chiite libanais), né un an plus tôt mais qui ne se rendra public qu’en 1985.

L’enquête suite à l’attentat du Drakkar pour éclaircir les zones d’ombre

Ce triste épisode soulève encore des interrogations qui ne trouvent pas de réponse. En effet, la thèse officielle de l’attentat a toujours été celle de deux camionnettes bourrées d’explosifs, la première venant percuter la siège des marines, tuant 241 soldats américains; la seconde, explosant contre l’immeuble Drakkar quelques instants plus tard. Ainsi, la thèse de la camionnette est critiquée, comme celle des tirs suivant le premier attentat contre le siège des marines. Certains émettent la thèse du bâtiment miné, ce que réfute l’enquête du commandement et l’enquête de l’inspection générale de l’armée. Pour eux, cette thèse est inenvisageable, car la charge explosive pesait 1,4 tonnes, impossible à dissimuler dans le Drakkar, compte tenu de toutes les mesures de précaution prisent par les services de sécurité. Des témoins de l’époque n’auraient cependant pas été entendus, et c’est bien là le problème majeur de l’enquête, comme le rapporte le journal le Monde dans son article dédié à la commémoration de l’attentat.

La commémoration, symbole de renforcement du lien armée-nation

Ce drame a été traumatisant pour l’armée française, qui avec les États-unis ont accusé le Hezbollah et l’Iran d’être les auteurs de cet acte. François Mitterrand s’est ainsi rendu sur place dès le lendemain pour apporter son soutien au contingent français. L’explosion du Drakkar reste pour l’armée française le bilan meurtrier le plus lourd en une seule journée depuis la fin de la guerre d’Indochine en 1954. Il est à noter que le 31e anniversaire de l’attentat du Drakkar a été commémorer par le ministre de la Défense Jean-Yves le Drian, le secrétaire d’État des Anciens combattants et de la mémoire ainsi que le chef d’État-major de l’armée de Terre; qui ont reçu les militaires survivants et les familles des victimes.

 Maxime JEANNETEAU

La communauté arménienne du Liban : « on se souvient »…

Tag Arménien Rue Haret Sader, Bourj Hammoud

Du 24 avril au 30 mai 2014, la communauté arménienne installée au Liban a fêté successivement le début du génocide arménien pratiqué par les turcs ainsi que le début de la lutte pour l’indépendance. Le quartier du Bourj Hammoud, appelé aussi la « Petite Arménie » s’habille aux couleurs de cette dernière. Bien que les arméniens se soient, par la force des choses, déplacés vers d’autres contrées, ils n’en n’oublient pas pour autant leur origine et leur Patrie.

 

 

« Ce n’est pas l’arabe qu’il faut apprendre. Ici, on parle arménien. C’est un morceau de notre pays. » me dit Léon, un bijoutier de la rue Arax, dans le Bourj Hammoud.

Le 24 avril 1915 marquait le début du génocide arménien pratiqué par les turcs.  La communauté arménienne représente aujourd’hui, au Liban, 5% de la population. La communauté fait parti intégrante de puzzle confessionnel qui fait la fierté du pays. Ici, la place des arméniens n’est plus à discuter. Leur réputation en terme d’artisanat et de joaillerie n’est plus à faire. Les guides touristiques les plus connus n’hésitent pas à les citer en exemple lorsqu’il s’agit de faire des affaires en matière de métaux précieux. Parfaitement intégrer au Liban, les arméniens n’en oublient pas d’où ils viennent et qui sont ils : les héritiers d’une diaspora malheureuse et menacée.

Bien que les arméniens fêtent le 99ème anniversaire du génocide de leurs ancêtres, la douleur de ce passé violent est toujours présente. En me promenant dans le chef lieu de la communauté, où je vis pour les besoins de mon stage, il est impossible d’ignorer les centaines de tags qui ornent les murs du quartier : « Fuck Turkey » ou encore  « Turkey guilty of genocide ». L’heure n’est donc pas à la réconciliation. Le jour de mon installation dans le quartier du Bourj Hammoud, le boulanger arménien le plus célèbre de la zone ne manque pas de me prévenir sur les thèmes sensibles à ne pas aborder ici, à savoir la Turquie qu’ils jugent, encore aujourd’hui, responsable des atrocités commises envers le peuple arménien installé dans le pays. Pourtant, cela fait presque 100 ans que les faits ce sont produits mais la communauté n’a jamais pu l’oublier ou même vivre avec, ce qui entretient de fait, une mémoire collective.

La solidarité entre arméniens est aussi le fruit d’un certain communautarisme. Bien que la communauté arménienne a choisi, entre autre, le Liban comme terre d’accueil et qu’elle y est parfaitement intégrée et attachée, cette dernière conserve le goût de ses pratiques culturelles et le quotidien s’organise autour d’elles. Intégration oui mais pas assimilation culturelle ! L’exemple le plus courant des traditions fortement ancrées dans l’esprit de la diaspora arménienne : le mariage qui ne doit se faire qu’entre arméniens.

« Si mon père apprend que je veux me marier avec un libanais, même s’il est chrétien, il me tuera! » me confie Nina Kosojian, étudiante en Droit à l’Université libanaise

Quoique le Liban soit tourné vers une certaine occidentalisation et modernisme, emmenant alors dans son sillage sa jeunesse, les traditions résistent et restent les garantes d’une identité que l’on conserve comme un joyau et qui, parfois font l’objet de tensions. Tensions qui persistent actuellement entre différentes communautés qui fragmentent le territoire et entretenues par les migrations intensives côté syrien. Tout cela ne favorise malheureusement pas une ouverture mais plutôt un repli communautaire. Ce repli communautaire constitue aussi une défense supplémentaire pour légitimer, par le poids démographique, une présence sur un territoire qui n’est pas le leur. La mémoire collective constitue évidemment le socle de cette communauté arménienne. C’est la raison pour laquelle, il me semble, que les commémorations sont aussi nombreuses en cette période.

La mémoire du génocide rappelle aussi les racines et l’identité chères aux arméniens qui n’ont pas hésité à créer leur propre monde, hors de leur territoire. La Turquie est aussi l’ennemi qui rassemble. L’entretien de cette haine ancestrale renforce la communauté autour d’un même combat: celui de la reconnaissance du génocide par les turcs. Les arméniens accusent encore les turcs de nier le génocide et comptent poursuivre le combat en quête de reconnaissance …

  » Le « catholicos » a rappelé que « le peuple arménien dans son ensemble et là où il se trouve réclame justice avec détermination et fermeté, suite au premier génocide du XXe siècle qui a été perpétré contre lui « .

Un grand merci à Léon Karagoshian, Nina Kosojian et Pépé Arsalian pour m’avoir fait partager des morceaux de leurs histoires et m’avoir permis de connaître l’histoire du peuple arménien.

Mais que fait l’Iran ?

sl20130615172850730Le Président de la République Islamiste d’Iran Hassan Rohani -Tous droits réservés-

Si on considère comme beaucoup de médias occidentaux que l’Iran ne serait qu’une dictature théologique et fondamentaliste, la dernière élection présidentielle du 14 juin 2013 peut paraître surprenante.

Malgré l’écartement du dauphin du dernier Président Ahmadinejad, et l’indécision d’un grand nombre de citoyens, les sondages du 6 juin annonçaient encore, comme au début de l’année, un duel au second tour entre deux conservateurs : Mohammad Ghalibaf (39% des voix au premier tour), maire de Téhéran, ancien chef de la police, conseillé du Guide Suprême Ali Khamenei, face à Mohsen Rezaï (16,8 %), officiellement recherché par Interpol pour une implication dans un attentat meurtrier contre les juifs d’Argentine, aussi proche de l’Ayatollah, ancien chef du Corps des Gardiens de la Révolution, ou Saïd Jalili (13,9 %) héros de la guerre Iran-Irak, partisan d’une politique étrangère agressive, également proche du Guide Surpême.
La preuve irréfutable de la dérive autoritaire du régime et la fin du rêve républicain clamait ainsi France24 après un entretien du 22 mai avec Azadeh Khian-Thiébaut, chercheuse au Centre national de recherche scientifique (CNRS) spécialiste de l’Iran et professeur de sciences politiques à l’Université Paris VII.
L’élection serait jouée d’avance, au pire truquée comme en 2009 lors de la réélection contestée du Président Ahmadinejad, alors accusé de fraude massive, les candidats modérés ne faisant là qu’un rôle de figuration.

Et pourtant, malgré des « intimidations » et un « manque de transparence » dénoncées par la BBC et les Etats-Unis, « des élections pas libres et équitables » pour le rapporteur de l’ONU, grâce à la division des conservateurs et le désistement 4 jours avant le scrutin du réformateur Mohammad-Reza Aref au profit de celui perçu comme un modéré : Hassan Rohani, ce dernier va remporter l’élection dès le premier tour par 50,71% des voix, loin devant ses rivaux conservateurs, Ghalibaf (16,56%), Saïd Jalili (11,36%) et Mohsen Rezaï (10,58%) avec 72% de participation.

Une heureuse surprise donc qui annoncerait sûrement un tournant dans la politique iranienne. Huit mois plus tard, sur le plan de la politique étrangère, l’Iran semble effectivement  avoir pris un nouveau chemin, profitant de la nouvelle donne au Proche-Orient pour se rapprocher de ses voisins et même des États-Unis.

Fini le « Grand Satan » américian, place à la négociation. Les accords de Genève sur le nucléaire marque ainsi une première étape vers la fin de 30 ans de conflits avec les occidentaux.
À l’Est, la République Islamiste semble s’accommoder du régime Afghan qui laissera toujours plus de place aux minorités iraniennes notamment les Hazaras chiites que les Talibans. L’Iran semble avoir également accepté de mettre sous silence les persécutions de la minorité chiite au Pakistan, considéré comme un allié par Washington, pour un nouveau rapprochement historique en tablant sur la dépendance énergétique de ce voisin. Est ainsi en projet un « gazoduc de la paix ». Si à l’inverse l’Inde, ancien partenaire objectif de l’Iran, semble se tenir à l’écart de cette réconciliation qui ne l’arrange guère, Téhéran peut là encore tabler sur les besoins énergétiques de ce géant en éveil pour à terme l’associer au projet.
À l’Ouest, la chute de Saddam Hussein avait déjà débarrassé l’Iran de son pire ennemi au profit des Kurdes irakiens et de la majorité chiite que Téhéran avait soutenue, gardant ainsi des relations très étroites avec le nouveau régime.
Au Sud, si l’opposition Arabie Saoudite-Iran se poursuit, ce que le Monde Diplomatique qualifie de « guerre froide » dans son édition de janvier 2014, avec le Liban comme lieu d’affrontement interposé, la République Chiite a toutefois fait de grandes avancées envers les autres pays du Golf Persique, multipliant les visites diplomatiques et laissant même entendre que l’Iran serait prêt à revoir sa position vis-à-vis des îlots contestés entre l’Iran et les Émirats Arabes Unis, annexés par le Chah en 1968.
Si les relations avec Ankara reste cependant assez délicates, en dehors du conflit syrien, les intérêts des deux grands pays non arabe du Moyen-Orient semblent toutefois concorder en de nombreux domaines alors que l’Iran cherche de nouveaux partenaires économiques et que la Turquie voit ses espoirs européens toujours plus s’éloigner. La visite du ministre turc des Affaires Étrangères à Téhéran en novembre dernier pourrait également être le début de la réconciliation entre les deux pays.

La Syrie reste donc le seul grand contentieux entre Téhéran et ses anciens adversaires hormis Israël. Mais si les médias occidentaux semblent s’être concentrés sur le rôle du Président russe Vladimir Poutine, ce serait l’Iran, selon ses propres services, qui serait à l’origine du compromis sur la destruction des armes chimiques ayant mis fin au risque de frappe aérienne occidentale contre le régime de Bachar el-Assad.
Quant à l’État Hébreu, bien qu’au lendemain de l’élection Netanyahu ait publiquement déclaré que le changement de gouvernement iranien « ne changerait rien », Le Président Rohani a également fait ce qui semble être un premier pas en reconnaissant le génocide des juifs par les Nazis pendant la seconde guerre mondiale, en 2013, à quoi s’est rajoutée la condamnation de ce fait par le ministre des Affaires Étrangères iranien, Javad Zariff à la télévision allemande ce 3 février 2014, tout en condamnant toutefois peu après le non respect des droits des Palestiniens par Israël.

Enfin, malgré tout ces retournements dans la politique étrangère iranienne et son souhait de dégeler ses relations avec les pays arabes et les occidentaux, le nouveau maître de Téhéran n’a pas pour autant perdu de vue les anciennes alliances passées par son prédécesseur. Les Brics restent ses principaux interlocuteurs et la Russie, qui a appelé à renforcer leurs liens, reste son principal allié dans la bataille qui se joue en Syrie avec le soutien diplomatique de la Chine. De même, les partenariats réalisés avec la plupart des dirigeants socialistes d’Amérique latine n’ont pas été démentis.

Depuis la dernière élection présidentielle, la République Islamique d’Iran sous la direction de Rohani semble donc réaliser l’exploit de conserver ses anciennes alliances internationales, poursuivre son soutien au Hezbollah Libanais et au régime Syrien légal, tout en renouant avec ses voisins par une attitude moins belliqueuse et avec les États-Unis par le dialogue sur le programme nucléaire. Cela laisse évidemment présager une amélioration rapide de l’économie iranienne, jusqu’alors en berne, grâce au desserrement de l’étau occidental tout en assurant à l’Iran une place incontournable dans les relations internationales à venir.

Vincent Houdou

« La vie et l’avenir des relations islamo-chrétiennes » : La question du dialogue inter-religieux lors d’une conférence

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Une conférence s’est tenue ce lundi 9 décembre à Angers, intitulée : « La vie et l’avenir des relations islamo-chrétiennes ». Cette conférence a été organisée par les associations « Amitié Libano-française », la Paix en Marche en co-organisation avec le Mouvement Coexister Angers.

Pour cet événement, deux personnalités de choix de l’association Adyan [religions en arabe] sont intervenues. Il s’agit d’une fondation libanaise pour les études inter-religieuses et la solidarité spirituelle. Cette organisation a été créée en 2006 par cinq fondateurs de confessions chrétiennes et musulmanes. Il importe, pour cette ONG, de toujours parler des religions au pluriel car il faut penser inter-religieux dans la mondialisation.

N’attendons pas plus longtemps pour vous présenter ces personnalités : Fadi Daou et Nayla Tabbara.

Le Prêtre Fadi Daou est Professeur en théologie fondamentale et en Philosophie politique. En plus de l’écriture de nombreux ouvrages sur la théologie des religions, sur le dialogue inter-religieux et sur la géopolitique des religions, il est aussi actuellement, Président et Directeur Général de la Fondation Adyan, puis Coordinateur des relations oecuméniques et inter-religieuses au Patriarcat Maronite. Quant à Nayla Tabbara, elle est professeur universitaire en science des religions et en sciences islamiques. Puis, elle est Vice-présidente et Directrice du Département d’études inter-culturelles de la Fondation Adyan. Elle est aussi à l’origine de nombreux ouvrages sur le commentaire coranique, le soufisme, la femme en islam et la théologie des religions et du dialogue.

Ces deux intervenants, que j’avais déjà eu l’occasion de rencontrer en 2009 à Beyrouth, œuvrent auprès de toutes les confessions religieuses pour favoriser le dialogue, la réconciliation.

Le livre qu’ils ont coécrit « L’hospitalité divine » a été le point de base des explications de la conférence. La conférence a été ouverte par Gilles Changeon, président de l’association « La paix en marche », et il nous a expliqué que c’est grâce à eux deux qu’a été accueilli en 2009 à Angers le Pasteur James et l’Imam Ashafa (Nigéria) qui ont ensuite reçu le premier prix Chirac de la prévention des conflits.

Nayla Tabbara, musulmane sunnite, a commencé en expliquant les raisons de la co-écriture de leur livre. En effet, il s’agissait d’un article du prêtre Fadi Daou sur la théologie de la rencontre entre islam et chrétien. Elle a donc décidé d’en faire la deuxième partie sur les théologies du dialogue. Les relations islamo-chrétiennes sont mises en évidence puisqu’il s’agit du contexte du Liban mais Adyan s’ouvre sur toutes les autres religions. Ainsi, il est certain que la diversité existe et qu’on ne peut pas être réductionniste pour Nayla Tabbara. La question qu’elle s’est posée est de savoir, aujourd’hui, comment peut-on regarder l’Islam ? Pour y répondre, elle a décidé de nous montrer qu’il y a différents groupes reconnus comme les chiites ou les sunnites, mais qu’il y a aussi différents courants théologiques. Comme par exemple, les salafistes, certains sont djihadistes et d’autres ne le sont pas et ne sont donc pas révolutionnaires. Mais elle rappelle à juste titre que la majorité de la population musulmane pratique l’Islam traditionnel. Elle parle aussi du soufisme qui essaie de favoriser une unité dans Dieu. Les traditionnels disent que le Coran parle lui-même de la diversité des religions mais les réponses sont ambiguës quant à la place de l’autre.

Pour essayer de répondre à cette question, en tant que personne de confession musulmane, Nayla Tabbara a eu une approche de foi, à travers tous les versets du Coran. Elle les a retravaillé selon le contexte de la révélation. Il n’est pas inutile de rappeler que le Coran a été révélé pendant 23 ans. Pour elle, il y a deux phases pendant cette révélation :

  • La phase mecquoise où il y avait une relation avec les mecquois qui étaient polythéistes, mais pas avec les prophètes bibliques.

  • La phase médinoise où il y avait des relations avec les chrétiens égyptiens mais surtout avec les tribus juives de Medine. Après l’évocation d’une même communauté et d’un même Dieu, un schisme est apparu dans un désir d’unité des premiers musulmans.

Le concept de l’unité dans la diversité provient de la sourate n°5 qui reprend la promesse du salut chrétien et les différends théologiques. Cela pose les bases : vivre dans la convivialité et faire les bonnes œuvres ensemble. Donc pour Nayla Tabbara, le Coran a une approche pédagogique.

Le Père Fadi Daou explique alors qu’il faut sortir du conflit interne pour arriver à la paix.

Pour Fadi Daou, quatre défis sont mis en évidence :

  • Le fondamentalisme qu’il ne faut pas ignorer. Il s’agit de toute attitude religieuse exclusive et qui utilise la violence selon sa définition. Il prend l’exemple de l’Irak où il y a des milliers de morts chaque année dans le conflit qui oppose Sunnites et Chiites. Cela montre que la violence n’a pas de limites car les personnes qui usent de cette violence affirment qu’ils agissent au nom de l’Islam. Pour lui,le fondamentalisme est une « pathologie ».

  • La fragilité des États dans cette région du monde. Il faudrait, en effet, renforcer l’État mais le non-respect des valeurs de l’État induit que l’État, lui-même, finit parfois par se conforter, aussi, dans cette violence. C’est le peuple qui en subit les conséquences, comme en Syrie où il y a entre 6 et 7 millions de déplacés sur 22 millions de personnes.

  • L’instrumentalisation du religieux ou de la religion par les médias et même par le pouvoir. « On mobilise les masses par des slogans », ce qui amène à des généralisations, des stéréotypes, à l’islamophobie en Occident.

  • Les mémoires blessées par les guerres dans le Moyen-Orient. Cette mémoire collective conflictuelle est un défi par rapport à la jeunesse.

Afin de répondre à ces quatre défis, Fadi Daou propose quatre outils :

  • Travailler sur le discours religieux lui-même, qu’il faut ajuster et adapter.

  • L’éducation à la gestion de la diversité. Il faut guérir la mémoire.

  • Le dialogue inter-religieux dans l’espace public. D’ailleurs Adyan met en œuvre des projets en commun où les différentes croyances doivent s’accepter.

  • Améliorer les relations entre l’Occident et l’Orient. En effet, il se pose la question de savoir s’il s’agit d’un défi ou d’un outil. Il est certain que si l’Occident instrumentalise afin d’exorciser sa peur de l’Islam, il s’agira d’un défi mais Fadi Daou décide de rester positif et donc de le considérer comme un outil.

Avant la fin de la conférence, une minute de silence a été consacrée à la disparition du dirigeant Sud-Africain, Nelson Mandela. Pris en exemple, pour avoir tendu la main à son ennemi afin de construire une nouvelle société, ensemble.

La conférence se termine alors par un certain nombre de questions. J’en relèverais une qui a été de savoir ce que nous pouvions faire, en France, en Occident pour aider à cette mise en place du dialogue entre les religions. Fadi Daou a alors répondu de ne pas demander à un chrétien d’Orient, comment il faisait pour vivre avec toute cette violence mais plutôt d’essayer de comprendre le chemin vers la paix qu’il a décidé de mener.

Amélie RIPOCHE

« Le Combat des Chrétiens du Levant »

Messe en Syrie (Tous droits réservés)

Messe en Syrie (Tous droits réservés)

Un film documentaire récemment diffusé sur KTO[1] propose un point de vue rare et précieux sur les communautés chrétiennes de Syrie et du Liban. Pour la première fois un patriarche des Chrétiens du Moyen-Orient a ouvert ses portes pour une excursion au cœur de la vie quotidienne des chrétiens dans le conflit qui secoue la Syrie et toute sa région. Le constat de départ est frappant : Après deux ans de combats, personne ne sait quelle proportion de la population soutient encore cette révolution instrumentalisée de toute part à Damas, Moscou et Washington ». Malgré des siècles d’histoire chrétienne les Chrétiens sont devenus une minorité « prise en tenaille entre la radicalisation de la rébellion et un régime protecteur[2] désormais honnis à leurs yeux ».

 

Les chrétiens sont peu entendus et peu écoutés. Ils sont pourtant une « une composante essentielle du tissu social syrien » : 10% de la population, une communauté réputée « active, éduquée et commerçante ». Au Liban, les Chrétiens représentent 30 % de la population et « peuvent encore démontrer leur neutralité » dans une société pluriconfessionnelle. De plus, La terre arabe est une terre biblique. « A Damas, une des plus vieilles villes continuellement habitées, des grand chapitres de l’histoire des monothéismes s’y sont écris pour ensuite prospérer dans le monde ». En 2001, Bachar el-Assad a lui-même reconnu la Syrie comme « berceau du christianisme ». Autrefois plus nombreux, les chrétiens sont devenus une minorité dont l’avenir est questionné par ce qui semble être l’avènement de l’Islam politique

Dans une révolution qui est devenue une guerre civile prenant de plus en plus les traits d’une guerre communautaire entre deux frères ennemis – les Sunnites soutenus par le Qatar et l’Arabie Saoudite (puissance pétrodollars) et les Chiites par l’Iran et le Hezbollah –, quelle position les Chrétiens peuvent-ils adopter ? Ces derniers expriment leur méfiance face à la révolution, tout en y participant et en désirant des changements. Ils ont cependant de plus en plus de mal à défendre leur neutralité face à l’éventualité d’un régime confessionnel. Le défi majeur est d’adopter une marche à suivre commune, malgré les divisions chrétiennes, pour parler d’une seule voix et réaffirmer le rôle des communautés chrétiennes dans la société syrienne. Les Chrétiens veulent bâtir des ponts, être médiateurs, représenter la troisième voie : « réunir par le dialogue et légitimer la coexistence ». Le rôle que l’Eglise se fixe est d’autant plus difficile et improbable que les objectifs sont immenses : « faire tomber un homme, Bachar el-Assad, et une idéologie, l’idéologie baassiste. »

Les tensions communautaires entraînées par ce conflit impactent toute la région, à commencer par le voisin libanais. Ce pays est déstabilisé au rythme des conflits régionaux par l’afflux des réfugiés : Palestiniens, Irakiens et aujourd’hui Syriens.  Dans la plaine de la Bekaa, refuge des Syriens, ceux qu’on appelle « les déplacés » vivent dans la peur d’être dénoncer (le Hezbollah contrôlerait Beyrouth), ils sont parmi les plus pauvres et vivent leur exil dans la misère et l’intolérance. Ces réfugiés, qui affluent massivement dans un pays de 4 millions de Libanais « réaniment bien malgré eux le spectre du sectarisme ». D’autant que le souvenir des 15 années de guerre civile, entache toujours les cœurs de la haine et de l’esprit de vengeance.

Dans « un conflits devenu sectaire, où l’on égorge les gens d’après leur religion », les chrétiens agissent par le biais d’organisations humanitaires confessionnelles. L’exemple du docteur Simon Kolanjian, chrétien, de Caritas Liban : « En Syrie, les chrétiens et les musulmans vivent ensemble. Le travail que font les organisations humanitaires chrétiennes comme Caritas et l’ONU montre que les Chrétiens sont amis des Musulmans, et ça où qu’ils soient, au Liban ou en Syrie. C’est la preuve que nous pouvons vivre tous ensemble, sans aucun problème. » Ce médecin part soigner dans les villages de toute confession. Dans le village de Younine (nord Liban), tenu par le Hezbollah, il est l’unique médecin du village, le Hezbollah paie pour ses consultations. Une habitante du village confie à propos du docteur Kolanjian « que l’on soit chrétien ou musulman, l’important pour la qualité de nos relations c’est l’éthique et non la religion. De toute façon nous sommes tous libanais dans un seul pays. Il n’y a pas de différence entre nous, il fait partie de la famille, on sent qu’il est avec nous, ce n’est pas un étranger. » Pourtant le médecin Kolanjian, venait annoncer son départ. Au motif (pudiquement faussé) de vouloir gagner plus d’argent parce qu’il travaille bénévolement, en réalité il part pour sa sécurité, le conflit syrien faisant craindre le pire dans la région.

En Syrie, au cœur du conflit, le patriarche melkite Grégoire III Laham[3], décrit la situation des chrétiens : « peu sont partis de Syrie mais on dénombre 200 000 déplacés à l’intérieur de la Syrie. Ceux qui se sont exilés sont partis au Liban proche, chrétiens, chez des amis ou en famille ». La mission du patriarche qui réside à Damas est de faire entendre la voix de l’Eglise. Il est le signe visible de la présence et de l’action de l’Eglise (cela passe notamment par la construction d’hôpitaux). « C’est en pasteur qu’il informe, pousse au dialogue, et milite en acteur à part entière ». Il dénonce cette révolution transformée en guerre civile par la haine. « On parle de mort et des déplacés mais on ne parle pas de la haine dans les villages ou chrétiens, chiites, sunnites et alaouites vivaient en paix et avaient des projets en communs. » Le patriarche décrit les chrétiens comme indépendants, jouissant d’une liberté de parole et très engagés dans la société. Son appel résonne par son intransigeance : « ce n’est plus le temps du oui ou du non au régime, maintenant nous sommes pour la paix ou la guerre. (…) En France et ailleurs, qu’ils nous écoutent plus nous les pasteurs. Qu’ils voient plus les réalités, et qu’ils travaillent, œuvrent avec nous pour la paix, la réconciliation devant leurs gouvernements. Qu’ils écoutent nos voix, nos rapports et qu’eux disent aux gouvernements : « voilà la réalité qu’il y a en Syrie, écoutez les pasteurs de l’Eglise en Syrie et œuvrez comme eux pour la réconciliation et la paix, et pas d’arme, pas de violence, la paix, la paix, la paix !! »

Agir rapidement et œuvrer pour le dialogue interreligieux voilà une nécessité. Pour l’ONG Relief and Reconciliation for Syria (http://www.reliefandreconciliation.org/index.html), il faut « éviter le pire en conciliant aide pratique et travaux de réconciliation ». Écouter tout le monde, travailler avec des autorités morales locales, unis autour d’une cause commune pour recréer les liens brisés. Malgré tout, pour Friedrich Bokern de l’ONG R&RS, ce « travail de longue haleine fait de rencontres et de discussion » se heurte à la réticence des plus radicaux. « On ne travaille qu’avec ceux qui sont vraiment prêts à s’ouvrir au principe du dialogue ».

Laurent Tessier


[1] http://www.ktotv.com/videos-chretiennes/emissions/nouveautes/documentaire-le-combat-des-chretiens-du-levant/00070748 (« Le combat des Chrétiens du Levant », coproduction KTO / Grand Angle Productions.Réalisé par Marc Watterlot, 2012.)

[2] Depuis l’indépendance syrienne en 1946, le parti Baas (dont Bachar El-Assad est le dernier représentant) est le protecteur des minorités chrétiennes. Le parti Baas a été crée en Syrie en 1947 par le chrétien Michel Aflak fondant l’identité nationale autour d’une langue, l’arabe, et un principe, la laïcité.

[3] Depuis 2000, « Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, d’Alexandrie et de Jérusalem des melkites ». L’Eglise grecque-catholique melkite rattachée à Rome au XVIIIème siècle rassemble plus d’1,5 million de fidèles principalement entre le Liban et la Syrie.