Le pape François au chevet de l’Europe

Pope Francis addresses the European Parliament in Strasbourg(c) DR

Le mardi 25 novembre, le pape François se rend devant le Parlement Européen et le Conseil de l’Europe. Il y encourage le projet européen.

Pour la première depuis vingt-six ans, le pape est invité par s’exprimer devant le Parlement Européen. Un moment historique pour trois raisons : le dernier pape a s’y être rendu était Jean-Paul II ; il s’agit aussi de la première visite d’un pape non-européen devant cette institution européenne ; et enfin, c’est l’un des voyages pontificaux à l’étranger les plus courts de l’Histoire. En effet, le déplacement n’a duré que quatre heures. Mais dans ce laps de temps, le pape François a eu le temps de faire passer un message à la fois critique et encourageant vis-à-vis du projet européen.

L’appel à se ressaisir :

Dans une grande partie de son allocution, le pape argentin exhorte l’Europe au réveil. Il dresse un état de lieux du projet européen qu’il juge replié sur lui-même, mal vu du reste du monde. « D’un peu partout on a une impression générale de fatigue et de vieillissement, d’une Europe grand-mère et non plus féconde et vivante » tranche le Saint-Père. Mais il critique aussi un détachement des peuples européens eux-mêmes : « Les grands idéaux qui ont inspiré l’Europe semblent avoir perdu leur force attractive ». Cependant, le pape François cherche à encourager le projet européen, qui n’est pas finit pour lui et qui est sous la menace des eurosceptiques. Il soutient un retour aux fondamentaux, aux pères fondateurs, en plaçant l’Homme au cœur du projet européen. Il rejette une Europe qui ne serait qu’économique, et affirme que la construction européenne ne peut que se poursuivre en intégrant pleinement une vision culturelle et anthropologique de l’Europe : « On constate avec regret une prévalence des questions techniques et économiques au centre du débat politique, au détriment d’une authentique orientation anthropologique ».

Condamnation indirecte de l’euthanasie et de l’avortement

Mais si l’Europe est centre de son discours, le pape n’oublie pas de rappeler indirectement les positions de l’Église, principalement quand il évoque l’anthropologie qu’il souhaite voir au centre du projet européen. Il rejette indirectement l’euthanasie et l’avortement : « […] lorsque la vie n’est pas utile au fonctionnement de ce mécanisme elle est éliminée sans trop de scrupule comme dans le cas des malades en phase terminale, des personnes âgées abandonnées et sans soin, ou des enfants tués avant de naître ».

Un diplomate plus qu’un pasteur :

Tout au long de son allocution, il semble que le pape se place plus en diplomate qu’en pasteur. Il évoque très peu la religion catholique, et ne cite le terme « Dieu », en tout et pour tout, que trois fois. Même si tout son discours est teinté de notion religieuse, il n’est pas le pasteur que beaucoup craignaient voir. C’est le représentant politique d’un État qui tend la main à l’Europe, et souhaite qu’il y ait une collaboration entre les instances européennes, et son État. « Je désire donc renouveler la disponibilité du Saint-Siège […] pour entretenir un dialogue profitable, ouvert et transparent avec les institutions de l’Union Européenne » déclare-t-il, avant de conclure : « l’heure et venue de construire ensemble l’Europe ».

Vingt-six ans après un pape venu de « l’autre côté du mur », c’est un argentin qui tente de secouer l’Europe. Cette dernière doit-elle toujours attendre « un étranger » pour se souvenir de ses bases ?

François VOUTIER

Le pape François confronté à l’éternel conflit israélo-palestinien

Vue de Jérusalem

Vue de Jérusalem

Le pape François a mené une visite symbolique ce dimanche 25 mai à Jérusalem, après être allé en territoire palestinien plus tôt dans la journée. Il s’y était recueilli au pied du mur de séparation qui traverse Bethléem, accueilli par le président Mahmoud Abbas et appelant à mettre fin à une « situation inacceptable, pour le bien de tous ».

Le pape en a profité pour inviter M. Abbas et le président israélien Shimon Pérès à prier pour la paix en Terre Sainte, les enjoignant de se rendre au Vatican. M. Abbas a accepté l’invitation dès dimanche, tandis que S. Pérès a déclaré le lendemain : « nous serons heureux de faire une prière dans notre maison ou la vôtre, à votre invitation et selon votre choix ». La date du 6 juin prochain est avancée. Le pape avait déjà souligné le droit pour le peuple palestinien d’« avoir une patrie souveraine et indépendante », provoquant ainsi la colère de l’extrême-droite israélienne. 26 activistes ont par ailleurs été placés en garde à vue lors d’une manifestation contre la venue du pape à Jérusalem, censé dispenser une messe sur le mont Sion le lundi 26 mai.

La réponse positive de Pérès ne convient pas aux positions intransigeantes affichées par le premier ministre de l’État, Benyamin Nétanyahou. Il ne serait pas étonnant de voir que la proposition ait été perçue comme une forme d’ingérence politique, comme cela a été le cas le 15 mai dernier, lorsque la ministre de la justice, Tzipi Livni, a rencontré M. Abbas à Londres, en présence de John Kerry. Il avait été rappelé que les négociations avaient pris fin en avril, après le rapprochement effectué par l’Autorité palestinienne avec le Hamas, et qu’Israël « ne négociera pas avec un gouvernement palestinien qui est soutenu par le Hamas ». Selon le quotidien Maariv, Mme Livni aurait même été proche d’un limogeage suite à la rencontre.

Dans la situation présente, il ne faut pas négliger les divergences apparues entre Nétanyahou et Pérès, qui se montre plus conciliant à l’égard des Palestiniens, étant même accusé de mener une diplomatie parallèle et de s’emparer du rôle normalement dévolu au premier ministre. Ces divergences se sont accrues récemment lorsque le Président a déclaré, sur une chaine de la télévision israélienne, qu’il y a trois ans, un accord aurait été presque conclu avec l’Autorité palestinienne, mais que la dernière réunion censée finaliser les négociations aurait été annulée par Nétanyahou. L’accord de paix, recherché depuis si longtemps maintenant, aurait ainsi été entravé par l’entremise du Premier ministre. Pérès se montre plus ouvert sur la question palestinienne, mais en dépit de sa venue prochaine à Rome, il ne faut pas oublier que son mandat présidentiel arrive à terme en juillet prochain.

La question d’un accord de paix israélo-palestinien reste d’actualité et le sera sans doute longtemps encore. Depuis le rapprochement réalisé entre l’Autorité palestinienne et le Hamas de Gaza, Israël a stoppé net le processus de négociations, refusant de traiter avec ceux qu’ils considèrent comme des terroristes. Les constructions illégales en Cisjordanie se poursuivent (l’organisation « La Paix Maintenant » a constaté une hausse dans les implantations de 70% pour le premier semestre 2013 !) et un dernier élément est à noter : la récente nouvelle de Nétanyahou concernant sa volonté d’inscrire le terme d’État juif dans la Constitution israélienne. Il a déclaré : « j’ai l’intention de soumettre une loi à la Knesset, qui constituera un ancrage constitutionnel pour le statut d’Israël comme Etat national pour le peuple juif », statut que rejetteraient immanquablement les Palestiniens sous peine de devoir renoncer au droit de retour des réfugiés. La prière à Rome ne modifiera pas la donne malgré sa portée symbolique, tant que le gouvernement israélien restera campé sur ses positions, qui de toute évidence sont défavorables à l’apparition d’un État palestinien voisin.

Déborah GUIDEZ

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/05/01/netanyahou-veut-ancrer-l-etat-juif-dans-la-loi-israelienne_4410342_3218.html

http://www.leparisien.fr/international/le-pape-francois-a-bethleem-vives-tensions-a-jerusalem-25-05-2014-3869501.php

http://www.lepoint.fr/monde/shimon-peres-accepte-l-invitation-du-pape-a-une-priere-commune-pour-la-paix-26-05-2014-1827970_24.php

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/05/26/le-pape-francois-court-circuite-benyamin-netanyahou-dans-le-processus-de-paix_4426024_3218.html